samedi 7 septembre 2019

"Denis Maljean renonce aux municipales" - La NR

"Denis Maljean renonce aux municipales" - La Nouvelle République, 04/09/2019

 
Le chef de file de l’opposition, Denis Maljean, ne sera pas candidat
aux municipales en mars 2020.
© Photo NR
 

Le chef de l’opposition lochoise ne sera pas candidat aux municipales en mars 2020. Sévère envers le maire, il ira au bout du mandat. Mais explique ne plus se reconnaître dans la politique actuelle.

 
Le choix est clair et net. « Je ne solliciterai pas les suffrages des Lochois aux municipales de 2020. Ni à la tête d’une liste, ni même comme colistier », annonce Denis Maljean dès le début de l’entretien qu’il nous a accordé. Il continuera à conduire l’opposition (1) face à Marc Angenault jusqu’à la fin du mandat, mais, après neuf années passées au conseil municipal, il ne participera pas à la course au fauteuil de maire de Loches en mars prochain. « C’est une des décisions les plus difficiles que j’ai eues à prendre ces dernières années », souligne Denis Maljean, qui met en avant « le contexte politique », notamment national, dans lequel il confie ne plus se reconnaître. Interview.
 

Vous êtes l’animateur de l’opposition lochoise. Votre légitimité à vous présenter est donc évidente. Pourquoi renoncer à être candidat aux municipales de 2020 ?

Denis Maljean : « Même si elle est mûrement réfléchie depuis cet hiver, ce n’est pas une décision aisée à prendre et à annoncer. Je ne solliciterai pas les suffrages des Lochois aux municipales de 2020. Ni à la tête d’une liste, ni même comme colistier. Si je voulais être un peu caricatural, je dirais que, même si cela ne fait que huit ans que je suis élu, j’ai plutôt l’impression d’appartenir à l’ancien monde politique, d’appartenir à une forme d’engagement politique historique, qui a des valeurs. Je reste persuadé que l’intérêt général, ce n’est pas le cumul des intérêts particuliers. Et que l’on ne défend pas les mêmes choses quand on est de gauche ou quand on est de droite, quand on est libéral ou quand on est favorable à une décision politique plus forte. »
 

La victoire du macronisme, qui prétend abolir les clivages, pèse donc sur votre décision ?

« L’élection présidentielle de 2017 reste pour moi une sorte d’énigme quand aux intentions et aux demandes exprimées par nos concitoyens. Par ailleurs, si je suis attentif aux revendications sociales des Gilets jaunes, la radicalisation de ce mouvement fait que je m’en sens tout autant étranger. Je me pose donc la question de ma propre représentativité par rapport à nos concitoyens qui, par leur vote [aux Européennes, NDLR], ont conservé un score honorable pour la majorité en place ou bien ont fait le choix d’un vote extrémiste. »
 

“ Depuis cinq ans la ville est dans une léthargie certaine ” 

 

Vous semblez pessimiste quant au climat politique général… 

« La violence verbale exprimée par certains de nos concitoyens trouve une vraie caisse de résonance sur les réseaux sociaux. Les violences physiques observées dans certaines manifestations ne sont absolument pas une façon normale de participer au débat démocratique. Oui, on peut se poser la question de l’avenir de nos institutions et de notre République dans les années à venir. Certains élus décident de relever le flambeau. C’est courageux de leur part. Je ne me sens pas la force. »
 

Pourquoi annoncer votre décision de ne pas vous présenter maintenant ?

« Il reste six mois avant les élections municipales. C’est un temps normal de débat approfondi pour une campagne électorale. J’ai également des questions de plus en plus pressantes de la part des Lochois qui s’intéressent à ce que je fais. Il me paraît honnête de ne pas laisser de faux espoirs quant à une éventuelle candidature de ma part. Mais je n’ai aucun doute sur l’issue des municipales à Loches. »
 

Vous voulez dire que vous pensez que Marc Angenault sera réélu ? 

 « En l’état actuel des forces en présence, Marc Angenault sera réélu, oui, c’est une quasi-évidence. »
 

Ne laissez-vous pas ainsi le champ libre au maire sortant, Marc Angenault ?  

« Ce n’est pas non plus un cadeau fait à Marc Angenault. J’ai la ferme intention de terminer ce mandat avec la même rigueur, la même fermeté et le même débat qui, jusque-là, ont été notre ligne de conduite dans le groupe “ Loches : changer d’ère ”. J’ai un jugement tout à fait sévère sur le mandat qui vient de s’écouler. Nous l’avons exprimé fortement lors du débat d’orientations budgétaires en faisant un bilan des réalisations du maire. Depuis cinq ans, la ville est dans une léthargie certaine. Face à cela, je comprends d’ores et déjà la colère et la déception des gens qui m’ont fait confiance et toujours soutenu. J’ai vraiment le sentiment de laisser orpheline une partie de ma famille politique au sens large et non partisan du terme (2). Ne pas me présenter est une des décisions les plus difficiles que j’ai eues à prendre ces dernières années. »
 
 
(1) Le groupe « Loches : changer d’ère ». (2) Denis Maljean a en effet quitté le PS depuis deux ans.  
 
 

à chaud

Avoir siégé pour être un candidat “ sérieux ”

> Quel bilan tirez-vous de votre action comme animateur de l’opposition lochoise depuis 2014 ?

Denis Maljean : « Ce n’est pas une découverte pour moi : le mandat d’opposant est extrêmement difficile, car, quoi qu’il se passe, on ne peut pas faire basculer une décision prise par la majorité. Cela peut paraître une goutte d’eau, mais je retiendrai le fait d’avoir réussi à faire verser les subventions aux associations avant l’été et non plus au cours du dernier trimestre de l’année. Là-dessus, on a été entendu. Cela semble accessoire, mais cela ne l’est pas pour les associations. L’affaiblissement de notre représentation au sein de la communauté de communes en raison de la scission dont a été responsable Anne Paquereau dès le début du mandat est en revanche une frustration. »

> Vous parliez du climat politique général. Et au plan local, comment le jugez-vous ?

« Je reconnais un très grand respect mutuel dans le débat que l’on a avec le maire de Loches. Même s’il est plus insaisissable que son prédécesseur [Jean-Jacques Descamps] qui assumait nettement sa stratégie et ses décisions. Là, on a eu affaire à des revirements. En dehors de la majorité municipale, j’avoue aussi que, quand je parlais tout à l’heure de violence verbale, j’ai dû porter plainte deux fois au cours de ce mandat pour l’envoi de lettres anonymes à mon domicile et à celui d’autres élus de gauche ainsi que pour des menaces sur les réseaux sociaux. Quand on habite au cœur de la ville, ce sont vraiment des moments désagréables, à des années-lumière de ce que je conçois du débat démocratique. Une des leçons de ce mandat, c’est qu’il faut apprendre à se blinder. Mais il a été également très enrichissant. Notre groupe d’élus est très divers (*) et nous avons toujours réussi à maintenir entre nous un débat serein permettant d’aboutir à une décision commune, collégiale et assumée par tous. »

> Comment voyez-vous ces six mois de campagne qui vont s’ouvrir sans que vous soyez candidat ?

« Je ne m’exprime pas aujourd’hui en tant que porte-parole de l’opposition “ Loches : changer d’ère ”. Et mes colistiers seront libres de s’exprimer, y compris sur leurs intentions quant aux municipales. Mais, comme nous allons bien sûr terminer le mandat, nous serons légitimes pour nous exprimer publiquement pendant la campagne. J’irai même plus loin : pour moi, tout prétendant qui n’a jamais siégé à la table du conseil municipal et qui ne s’est pas déjà frotté aux lourds dossiers que sont le budget ou encore la révision du plan local d’urbanisme et du secteur sauvegardé, ne pourra être considéré comme sérieux. »

(*) Il compte notamment dans ses rangs Marc Vincent, devenu depuis animateurs des macronistes du Lochois. 


à savoir

“ Aucune pression ”

> Depuis quelques mois, Denis Maljean est employé, au sein de la cité royale, par le conseil départemental dirigé par la famille politique de Marc Angenault. Cela a-t-il pu peser dans son retrait de la course aux municipales ? « La question de ma précarité professionnelle a longtemps été un point important dans ma décision, répond Denis Maljean. Mais je n’ai reçu aucune pression. Cela dit, force est de constater, même si les élus ont une liberté d’expression importante, qu’à chaque conseil municipal depuis que j’ai pris ce poste, j’ai dû au moins une fois par réunion de ne pas prendre part au vote car elle impliquait mon employeur. Aujourd’hui, conduire un débat municipal en mettant de côté tout ce qui relie la commune au Département – ce lien essentiel pour nos territoires ruraux –, comme la question des remparts, de la RD 943…, est impossible. »
  
 
Cliquer pour accéder au fichier .PDF
© NR
 
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire